Publié le
19/6/2023
15 ans d’expérience auprès de décideurs et d’acteurs de la transformation nous ont permis d’observer plusieurs biais autour du pilotage, parmi lesquels :
• La plupart des acteurs d’une organisation sont concernés de près ou de loin par le pilotage. Du Directeur Général à l'opérationnel, chacun a ses propres enjeux et prérogatives en matière de pilotage et ces enjeux peuvent parfois être divergents,
• Les prérogatives et pratiques de pilotage sont intiment liées à l’environnement (concurrence, cadre réglementaire…), à la culture de l’entreprise et à la maturité des acteurs ; la discipline est principalement appréhendée de manière empirique, sans vérité absolue qui puisse s’affranchir des spécificités d’une organisation,
• Certains décideurs manquent de clarté sur l’information utile à la prise de décision, y compris sur la connaissance de leurs propres besoins de pilotage. Un réflexe souvent observé consiste alors à exiger un niveau de détail important du système de pilotage « au cas où on en aurait besoin », ça rassure... Cependant, cette approche grève la pertinence et la crédibilité des dispositifs de pilotage dès lors que les acteurs prennent conscience que leurs informations ne sont pas ou peu utilisées.
Le pilotage des activités est un processus vital pour toute organisation, qui vise à s’assurer que les activités qui sont lancées créent de la valeur pour l’entreprise (faire les bonnes choses) et à s’assurer de leur bonne exécution (bien faire les choses).
Dans un cadre de responsabilité bien défini, un dispositif de pilotage frugal permet ainsi :
• De disposer d'informations essentielles pour comprendre ce qu’il se passe vs. ce qui devrait se passer au sein d'une organisation. Cela passe notamment par la mise en place de tableaux de bord avec des indicateurs clés, des prévisions de volumes en jours ou en euros, ainsi que d'autres éléments habituels d’un Business Case,
• D'être en alerte pour réagir aux événements qui se produisent, qu'il s'agisse d'un projet stratégique en difficulté, ou d'un livrable opérationnel qui dérive,
• In fine, de prendre au plus tôt les bonnes décisions, de manière à atteindre les objectifs fixés et à sécuriser la bonne exécution des projets.
C'est dans ce contexte que l'approche "tête haute" en matière de pilotage prend tout son sens. Cette approche consiste à :
• Se concentrer sur les éléments de pilotage les plus pertinents, les plus « faciles » à produire et les plus clairs pour les parties prenantes,
• Présenter ces éléments de manière concise et facilement interprétable, à l'instar de l'affichage tête haute dans les avions qui permet aux pilotes de visualiser les informations importantes sans avoir à consulter l’ensemble des éléments de leur tableau de bord.
Pour mettre en place un dispositif de pilotage frugal et efficace, 3 dimensions sont importantes à définir :
1. Les indicateurs « invariants » qui sont communs à toutes les organisations, tels que la qualité, les coûts, les charges et les délais,
2. Les indicateurs propres au contexte de l'organisation, comme un plan de transformation à mettre sous contrôle ou un Schéma Directeur à piloter,
3. Les indicateurs attendus par les opérationnels pour les impliquer dans le dispositif.
Si l’on prend une métaphore médicale, le pilotage tête haute correspond aux constantes médicales vitales, telles que le taux d'oxygène ou la tension artérielle. Ce sont des éléments clés que l'on doit surveiller en permanence. Ensuite, pour certaines pathologies, des données particulières doivent être mises sous contrôle, comme le taux de cholestérol dans le cas d'un suivi spécifique. De même, en fonction du contexte et des besoins opérationnels, des données spécifiques doivent être intégrées au dispositif de pilotage pour en assurer l'efficacité.
Par exemple, certains dispositifs se centrent sur le pilotage des engagements clés, en tant que colonne vertébrale du pilotage “tête haute”. Il s’agit ici de se concentrer sur les éléments utiles et nécessaires qui nourrissent les échanges entre une entité (une DSI par exemple) et ses clients (notamment les métiers et la direction générale).
Les engagements clés font référence aux engagements principaux pris entre les parties prenantes concernant le delivery des projets ou des produits (le périmètre, les coûts, les délais, la valeur…). Il s'agit donc de suivre les échéances, de vérifier si la valeur attendue est au rendez-vous et si les coûts sont conformes aux estimations initiales.
Pour donner une idée de volume d’information traitée, nous avons mis en place pour une DSI d’environ 800 personnes, un monitoring de 70 engagements clés : des échéances importantes de programmes de transformation stratégiques, de projets à forte visibilité sur le marché, de mises en conformité au regard d’exigences réglementaires, etc.
Afin de mettre en œuvre une approche de pilotage “tête haute”, deux bonnes pratiques peuvent s'appliquer dans la plupart des cas, à adapter en fonction des spécificités de chaque organisation :
• Humilité et « Test & Learn » :
Il est important d'apprendre en marchant. Il n'est pas nécessaire ni possible de tout connaître à l'avance. Il est donc conseillé de mettre en place rapidement un dispositif de pilotage et de le faire évoluer en fonction des feedbacks reçus et de la valeur produite par ce dernier.
Cette approche "test and learn" doit nécessairement s’appuyer sur une logique de co-construction et faire l’objet d’une communication régulière et ciblée auprès les parties prenantes.
• La frugalité comme ligne directrice :
Il est conseillé de limiter les indicateurs à produire lorsque l’on a doute sur leur utilité ou leur pertinence. Il sera toujours plus facile d'enrichir un dispositif de pilotage que de chercher à le simplifier, d’où l’intérêt de démarrer par les fondamentaux, les invariants du pilotage.
Les outils de pilotage (PPM, SEM…) sont des outils qui permettent de centraliser les données des activités (programmes, projets, activités récurrentes, demandes…) au sein d'une organisation. Ils peuvent répondre aux enjeux de pilotage “tête haute” en fournissant une source unique de vérité pour l'ensemble des informations nécessaires au pilotage stratégique.
En outre, ces outils peuvent aider à comprendre et monitorer les dépendances entre les activités et les ressources. Par conséquent, ils permettent de mieux gérer les ressources en anticipant les conflits et en prenant des décisions éclairées sur l'allocation de ces dernières.
Au-delà d’un certain nombre de projets et de collaborateurs, ces outils deviennent indispensables pour collecter les informations (prévisions de charges et de coûts, plannings, risques, indicateurs de santé…) et améliorer l’efficacité opérationnelle en réponse aux objectifs stratégiques.
Easis a développé des approches et méthodes permettant de définir le modèle de pilotage d’une organisation, de poser une feuille de route permettant de mettre en place le dispositif de pilotage qui le sous tendra et enfin d’animer ce dispositif.
Cela se traduit concrètement par un « framework » de mise en place d’un dispositif de pilotage “tête haute”. Ce cadre s’alimente de nos nombreux retours d’expériences et bonnes pratiques déjà éprouvés.
Notre démarche se décompose en plusieurs étapes :
1. Comprendre l’environnement, la culture, les enjeux et les attentes en matière de pilotage de l’organisation que nous accompagnons.
2. Définir une cible à atteindre avec un plan de montée en maturité progressif comprenant des paliers de mise en œuvre.
3. Travailler sur plusieurs dimensions pour mettre en place un « kit de pilotage tête haute » : pratiques / processus, méthodes, système de management, données et tableaux de bord, outils et compétences.
4. Déployer le dispositif et le(s) outil(s) de pilotage par itérations successives, en prenant en compte les feedbacks pour adapter et faire évoluer le dispositif en continu
5. Définir les modalités d’animation du dispositif.
Le pilotage d’une organisation est un enjeu clé et une mission régalienne pour toute entreprise. L’exercice peut s’avérer difficile tant la discipline est riche et complexe. L'approche pilotage “tête haute” a pour objectif de permettre aux décideurs de faciliter leur prise de décision et de favoriser la réussite de leurs projets de transformation. C’est une approche pragmatique, centrée sur la réalité de l’organisation et de ses spécificités.